The Morning Show : une seconde saison qui prolonge le régal

Véritable machine à divertissement, aux multiples personnages tous plus vivants les uns que les autres, « The Morning Show » démontre une nouvelle fois, avec cette saison 2, une qualité indéniable pour brosser le portrait du monde médiatique outre-Atlantique. 

L’univers impitoyable des émissions matinales a été l’une des séries percutantes de 2019, pour lancer en grandes pompes la plateforme de streaming d’Apple. Une grande toile où journalistes, producteurs et grands pontes d’une chaîne se retrouvent à échafauder un plan pour ne pas laisser éclater un gros scandale d’harcèlement sexuel. Une chasse à l’homme à l’ère de #MeToo. 

La victime se nommait Mitch Kessler (Steve Carell) – à présent calfeutré dans sa villa italienne -, campé par le toujours excellent Steve Carell. Au milieu de ce marasme, Alex Levy (Jennifer Aniston) pour tenir la barque et désormais érigée comme lanceuse d’alerte. Une icône féministe rongée par la culpabilité. Désormais loin du bal, Levy écrit des bouquins, laissant Bradley (Reese Witherspoon) présenter le show avec Eric Nomani (Hasan Minhaj). Mais au pays de l’Oncle Sam, les chiffres – ou le fric – est roi: les audiences sont en chute libre et Corey Ellison (et bon dieu, filez un Emmys à Billy Crudup !) sent que sa place est en danger. La parade est simple : rapatriez Alex Levy et son producteur Chip Black (Mark Duplass) sur le plateau de UBA. Le monde est cyclique qu’il disait.

Furieuse immersion dans l’hypocrisie 

« The Morning Show » se frotte à la pandémie de Covid-19, à l’élection présidentielle et à l’hygiénisme de notre époque. Une séquence très intéressante, dans laquelle Yanko Flores (Nestor Carbonnell) évoque à l’antenne son « animal totem », démontre la répugnance de notre société. Le pauvre est traîné dans la boue par le tribunal du net. Twitter et ses abonnés assoiffés de bien-pensance vont obliger la chaîne et son présentateur météo à adresser des excuses à l’antenne. Notre ère est plus folle que jamais. Et c’est à partir de cette obsession du politiquement correct que la percée deviendra tentaculaire dans cette marmite médiatique. 

La grande essoreuse publique va en recracher des âmes salies et fichues. Hannah Schoenfeld (Gugu Mbatha-Raw) en avait déjà fait les frais dans la saison 1. Un suicide qui aura pour conséquence de souffler le château de cartes une fois les caméras éteintes. « The Morning Show » poursuit sa critique de la misogynie et sa chasse aux sorcières. Grâce à sa narration tendue, un brassage de nombreuses thématiques est aussi à l’ordre du jour. Un vrai feuilleton, avec des personnages tous parfaitement incarnés, pour donner corps à un show qui ne traverse pas une unique bataille – le harcèlement et l’exploitation de la femme -, mais bien les différents combats quotidiens de tous les protagonistes. Du petit combat au plus gros combat ; du personnel au professionnel. 

Et niveau casting, outre l’excellent Billy Crudup et le furieux tandem Aniston/Witherspoon, de nouveaux visages viennent illuminer le récit. Je pense surtout à la révélation Greta Lee, sous les traits de Stella Bak. Embâuchée par Ellison, l’actrice aperçue dans « Russian Doll » brille dans ce personnage très strict, fichtrement glacial au moment de taper du poing sur la table. Sans oublier l’arrivée triomphale de Julianna Margulies – l’éternelle Alicia Florick -, dans le costume d’une présentatrice ouvertement homosexuelle. Et là encore le tribunal des réseaux sociaux a fait valoir son droit… 

Cette fois-ci, « The Morning Show » prouve qu’elle est une série qui use de son potentiel et qui s’affirme comme une production de grande ampleur. Jay Carson et Kerry Ehrin ont réussi à injecter différents niveaux de narration pour construire les bases d’une industrie qui lutte sans cesse pour suivre l’évolution du temps, emmaillotée dans un paquet de névroses et de maquillage, masquant les rides d’une époque avilissante, au mieux hypocrite. 

Casting : Jennifer Aniston, Reese Witherspoon, Mark Duplass, Steve Carell, Billy Crudup, Greta Lee, Karen Pittman, Desean Terry

Fiche technique : Créée par : Jay Carson et Kerry Ehrin, d’après une histoire de Brian Stelter / Plateforme : Apple TV+ / Format : 10 épisodes – 55 min / Date de diffusion : 17 septembre 2021