5 ans les séparent, ils sont tous deux bardés de récompenses, des faiseurs de tubes. Taylor Swift et Justin Bieber ont une carrière qu’on peut qualifier de prolifique et semblable à bien des égards. Alors que la première est face caméra dans un film documentaire sur Netflix, Miss Americana présenté au dernier Festival de Sundance, on suit le second dans une nouvelle série diffusée sur Youtube Originals.
Une trajectoire éclatante, des followers par millions sur Instagram, une fortune qui ne cesse de gonfler, Justin Bieber et Taylor Swift ont connu rapidement la célébrité et le sommet des charts. Mais comme tout le monde le sait, l’ultra-célébrité est une prison dorée, souvent assortie d’une lente et vertigineuse chute. À travers ces deux productions, deux destins différents mais pas tant que ça.
Chanter pour contrer la solitude
Réalisé par Lana Wilson, Miss Americana dépeint une Taylor Swift au firmament de sa célébrité, mais surtout proche du point de rupture. Dans Justin Bieber : Seasons, l’artiste canadien revient sur sa percée folle dans le milieu musical, avant de voir la célébrité lui monter à la tête, ouvrant un grand trou l’aspirant dans son obscurité. C’est là où la série et le film se croisent et développent une ficelle ô combien importante pour ces 2 artistes : le contrôle ou, dans tous les cas, la poursuite du contrôle.
Dans un business où l’image véhiculée dans les médias devient une lutte sans concession, devenant par la même occasion une sorte d’obsession, Bieber et Swift ont perdu contre le monde. La folie des médias, la méchanceté du moindre internaute heureux de déverser sa haine est propice à blesser un artiste, surtout à l’heure des réseaux sociaux. Le constat est criant pour la chanteuse pop-country, profondément blessée par cette haine virtuelle. En témoigne cette situation inconfortable avec Kanye West qui la poussera à quitter le navire de la célébrité, trop touchée par l’animosité des uns et des autres.
Un cas similaire pour Bieber, traîné dans la boue par différents médias, par les paparazzis, poussé à quitter le devant de la scène pour se ressourcer loin des projecteurs. Des actes forts pour ces deux superstars. Des machines à tubes qu’on pensait armées pour faire face à cette déferlante médiatique. Eh bien non, ils restent deux êtres sensibles, deux êtres humains. Une perte de contrôle qui entraîne irrémédiablement une réputation entachée. Cette image si difficile à polir – souvent travaillée par une équipe de communication – se retrouve salie par le moindre fait et geste, par la moindre parole malheureuse. Le piège de la célébrité se referme rapidement et ne laisse que peu de répit.
Swift et Bieber : à la recherche du contrôle
« JB » s’en est allé, loin des stades et de ses fans. Il a trouvé ce fameux contrôle auprès de sa dulcinée : Hailey Baldwin. C’est elle, en grande partie, qui a réussi à lui faire retrouver cette notion du contrôle. Animé par l’envie d’utiliser son don à bon escient, de partager sa musique avec le monde, Bieber retrouve le chemin des studios. La série évoque plus un processus créatif qu’une descente aux enfers, à contrario du documentaire Miss Americana, plus axé sur la question de la célébrité, de la relation que Swift entretient avec le monde extérieur.
Le film étonne par des phrases telles que «j’ai appris à être heureuse en recevant des éloges» ou «je suis devenue celle que tout le monde voulait.» Des phrases qu’exprime l’artiste originaire du Tennessee, comme un aveu de faiblesse. Ce besoin perpétuel d’être la fille «gentille» lui a fait perdre le contrôle infiniment important dans une industrie qui vous broie au moindre faux-pas. Ses paroles démontrent une réelle solitude qui ne fait qu’accroître plus les tubes s’enchaînent. Miss Americana tend vers cette étrange sensation de voir une jeune adolescente prisonnière d’une carapace, celle d’une star mondiale encore immature, encore fragile à la moindre remarque. Une sensation également valable pour Bieber dans une plus moindre mesure.
Bieber et Swift, à la recherche de ce contrôle, vont arpenter le chemin de la déconstruction. Pour l’une, c’est l’incident sur scène avec Kanye West qui va faire office de détonateur, pour l’autre, c’est une somme d’épuisement. Pour deux artistes aux trajectoires pleine de succès et semblables, Hailey Baldwin dit quelque chose de très juste : «Justin Bieber a grandi devant le monde entier, pour ensuite se transformer en un adolescent, un jeune homme puis un adulte.» En somme, Miss Americana et Justin Bieber : Seasons révèlent deux artistes en pleine mutation, arrivant à maturité face à des hordes de fans en délire, des médias intransigeants, une opinion publique impitoyable. Pas facile de grandir, apprendre et vivre devant tant de monde.