Sur Canal+, les 4 rendez-vous de février

Pour ce deuxième mois de l’année, Canal+ nous concocte une programmation variée. Difficile de faire un choix devant l’offre pléthorique, hein ? Nous vous proposons nos 4 « immanquables » du mois de février. Après, The New Pope et les grandes envolées poétiques du maestro Paolo Sorrentino, c’est le duo Benzekri/Delafon qui dévoile une autre création originale phare du groupe audiovisuel français. Baron noir, pour ne pas la citer, fait office d’épouvantail en ce mois. Mais derrière les manigances de Philippe Rickwaert, la liste est alléchante.

Baron Noir (saison 3) à partir du 10 février

Philippe Rickwaert en veut toujours, il est même mort de faim. Le petit prolo est désormais tiré d’affaire, loin des barreaux, hors de l’ombre des politiciens. Dans cette saison 3, visible à partir du 10 février, c’est plutôt la lumière que Rickwaert souhaite étreindre. Son obsession du pouvoir ne va faire que grandir dans une 3ème saison où les manigances et les différentes gauches vont s’allier et se désunir.

Animé par son nouveau projet de se présenter aux présidentielles, le natif de Dunkerque avance en silence et (encore) dans l’ombre pour faire tomber Amélie Dorendeu (Anna Mouglalis), présidente de la République. Rickwaert, aspiré par les arcanes du pouvoir, se révèle encore plus coriace. Sur le ring, sa véritable nature s’affiche et l’autodestruction n’est qu’à quelques encablures.

Une 3ème levée que le duo Jean-Baptiste Delafon et Eric Benzekri réussit à prolonger sur les sentiers de la folie du pouvoir. À l’époque des fake news, Baron noir 3 demeure plus hargneuse que la saison 2, mais peut-être moins réussie que les 2 cuvées précédentes. Une grande toile faite de portraits peints au vitriol, où Kad Merad se sublime, persévérant dans le meilleur rôle de sa carrière. Le récit s’enfonce dans une France clivante, où le fossé entre le peuple et les hautes sphères de la République se creuse toujours plus.

«La présidentielle est devenue une série télévisée» s’insurge Amélie Dorendeu – comme un clin d’oeil à une réalité dépassant la fiction. Avec le spectre du «syndrome Donald Trump ; des tweets en roue libre», Baron noir dépoussière le gaullisme, où s’amoncellent haine et mépris, comme l’incarne cette phrase dégoisée par Rickwaert : «Pour vaincre, il faut haïr.» Une saison 3 qui plaît par sa radicalité et son rythme effréné.

Kidding (saison 2) à partir du 10 février

Après une première saison remarquée en 2018, Kidding rempile pour une seconde saison. Toujours emmené par Jim Carrey, produit et partiellement réalisé – l’épisode 5 et 6 – par Michel Gondry, Kidding nous avait présenté Jeff Pickles (Jim Carrey), un animateur télé mélancolique, chagriné par la mort de l’un de ses fils et par l’échec de son couple. La fin d’une ère.

Après une première saison rondement menée, la suite semble scabreuse. Seb (Frank Langella), le producteur de l’émission Jeff Pickles, s’inquiète de l’état mental de son poulain. Leur empire risque de s’effondrer. Dans cette saison 2, le présentateur est confronté à ses erreurs, ses défauts et son chagrin. D’une simplicité exemplaire, d’une sobriété face au vertige du deuil, Jeff devient honnête avec lui-même en acceptant que sa vie fut une spirale infernale de coups durs.

Jim Carrey livre une performance éclatante, celle d’une carrière. Ancré dans la tristesse et la complexité de la sphère familiale, Carrey emmène Kidding encore plus haut que dans la première saison, dans son écrin fantaisiste et mélancolique.

Sibyl (25 février)

Après Victoria, la cinéaste Justine Triet grimpe d’un échelon avec l’excellent Sibyl, et nous pesons nos mots. Un trio, 2 femmes et un homme. Une psychanalyste, une actrice et un acteur. Sibyl (Virginie Efira), la psychanalyste, a délaissé le milieu littéraire depuis un bail pour endosser le rôle de thérapeute. Après 10 ans d’activité, il y a comme un manque, une obsession : l’écriture et son processus créatif.

Décidée à tout mettre en stand-by pour travailler sur son nouveau livre, Sibyl rencontre fortuitement Margot (Adèle Exarchopoulos), une actrice en pleine détresse et, qui plus est, enceinte de l’acteur principal du film dans lequel elle tourne : Igor (Gaspard Ulliel), lui-même en couple avec la réalisatrice du film, Mika (Sandra Hüller).

Si Sibyl se plaît à écouter et aider les autres, c’est elle-même qui aurait besoin d’aide. Ancienne alcoolique, mère attristée, elle est à l’agonie, hantée par un amour passé : Gabriel (Niels Schneider). Passion dévorante, romance charnelle. Des souvenirs brûlants de désir, une faille encore présente. Sibyl est tout ça à la fois. Relation aux multiples facettes croisant des êtres névrosés, tristes, à bout et manipulateurs. Tout se dérobe et prend une ampleur désastreuse. Sibyl replonge dans son passé non-exorcisé, quitte à perdre pied. Elle vacille alors qu’elle tente d’aider une femme courbée par la douleur. Le malheur comme dernier rempart avant l’autodestruction, baigné dans ce délicieux clin d’oeil à Roberto Rossellini et son film Stromboli. Justine Triet offre à Virginie Efira un rôle puissant et profond. Une tragicomédie ensevelie dans un magma émotionnel en fusion.

Le Daim (28 février)

Difficile de ne pas citer Quentin Dupieux comme l’un des cinéastes français les plus singuliers. Auteur clivant, Dupieux ne laisse personne indifférent. En témoigne des oeuvres telles que Au Poste!, Réalité, Steak ou encore Rubber. Avec son dernier film en date, Le Daim, il n’hésite pas à mettre en scène un Jean Dujardin drôle et… glacial. Inquiétant, vénéneux quand l’acteur français se met en mode thriller.

Photo copyright : Atelier de production

Après avoir claqué tout son fric dans un blouson en daim et reçu une caméra en prime en guise de geste commercial, Georges (Jean Dujardin) a dorénavant «un style de malade» et une caméra pour se lancer dans un projet cinématographique d’envergure. Dans son QG, un hôtel vétuste, il devient créateur de l’absurde. Dédoublement de personnalité, l’homme est animé par une obsession étrange, une quête aussi impossible qu’improbable : rayer tous les blousons de la planète.

Dujardin, sous les ordres de Dupieux, endosse un rôle qui lui va comme un gant. Excellent, tout comme cette résonance dessinée par Dupieux, contant les névroses de la race humaine. Le daim (la matière) opère comme une métaphore. Récit d’un sociopathe aux délires loufoques, à la violence froide et sourde. À ne pas rater !