Le retour de Mike Flanagan est souvent un moment qu’il faut chérir et caresser avec délicatesse. Le cinéaste et créateur nous revient avec une nouvelle série horrifique, au coeur bien noir et triste, après 2 saisons passées dans des manoirs hantés.
L’amour en toile de fond, l’horreur de front. Ce même amour tiède et vieillissant, qui, au détour d’un regard échangé, revient chaud et intense, brûlant comme l’est la vie. Dans « Sermons de Minuit », le feu souffle des braises noirs, les corps deviennent poussière, les âmes s’envolent.
La série, se centrant sur une communauté insulaire (Crockett Island), nous présente Riley Flynn (Zach Gilford), un ancien habitant de l’île parti à Chicago. Le malheureux a été condamné après un accident qui a coûté la vie à une jeune femme. 4 ans de prison plus tard, l’homme revient sur ses terres, chez ses parents, pour mettre un peu d’ordre dans sa vie. Il rencontre le Père Paul (Hamish Linklater), un mystérieux prêtre débarqué pour remplacer un vieil ecclésiastique connu de tous. C’est également l’occasion de renouer avec ses amours d’antan, tout spécialement avec Erin (Kate Siegel). Les 2 se retrouvent le soir, discutent de leurs rêves respectifs et de leurs frustrations, de la mort. Outre ces retrouvailles, des événements commencent à se succéder, débordant sur des miracles pour cette communauté ultra religieuse.
Les ombres religieuses
Mike Flanagan disperse les indices sans trop s’affoler, déroulant le ruban des remords. Les premiers épisodes – tous plus d’une heure – se languissent et posent les fondations d’une introspection biblique et de l’immortalité. L’horreur et la religion, pour traverser ce doux rêve (ou cauchemar) de l’éternel. « Sermons de Minuit » brasse des sujets symboliques. Mais c’est avant tout une connexion entre l’horreur et la religion: la Bible aurait des accents horrifiques, reliant les écrits à une face bien plus sombre – les voies du Seigneur sont impénétrables.
Centre névralgique de cette communauté, l’église renferme les secrets de Père Paul. Sous les ordres du nouveau prêtre, les habitants commencent à s’agglutiner pour assister à ses messes. Des miracles, comme une jeune fille réussissant à retrouver sa mobilité après un accident. Les bras du Seigneur sont ouverts pour accueillir des habitants harnachés à des chagrins persistants. La série s’engouffre dans les écrits religieux, mais offre une percée philosophique, un questionnement à travers la foi et la mort. Les monologues déballent une preuve évidente: l’être humain est seul et démuni face à ses chagrins. Une réflexion sur la mort et son après, empreinte de tendresse, flirtant parfois avec le sublime.
Hamish Linklater y est magnétique
Des dialogues engageants, des paroles percutantes, Mike Flanagan autopsie une communauté fascinée par la grâce de Dieu, quitte à remettre en cause leur propre libre arbitre. La main gantée du tout-puissant, pour aveugler ses fidèles. « Sermons de Minuit » déborde vers l’horreur et inspire la peur. De la bénédiction venue du ciel, l’apocalypse s’abat telles les flammes de l’Enfer. Et avouons que pour un programme Netflix, le show fait du bien dans son développement, dans sa façon d’aborder des thématiques lourdes et délicates.
Un ton en-dessous de « The Haunting Of Hill House » ou encore « The Haunting of Bly Manor », cette nouvelle mouture « flanagienne » sent bon la noirceur et les remords, noyant des choix scabreux et malheureux. La performance d’Hamish Linklater, excellent et intense, vaut peut-être à elle seule le détour. Une invitation à méditer la place de la religion, le malaise d’une Bible parfois mal interprétée – le personnage de Bev Keane (Samantha Sloyan) l’illustre – substituée à une trame horrifique pour cristalliser les peurs. Mike Flanagan, même si nous l’avons connu plus inspiré, en impose.
Casting : Zach Gilford, Kate Siegel, Hamish Linklater, Samantha Sloyan, Annabeth Gish
Fiche technique : Créée par : Mike Flanagan / Plateforme : Netflix / Date de sortie : 24 septembre 2021 / Format : 7 épisodes – 60 min