Perry Mason : une nouvelle jeunesse bienvenue

Loin de la série en noir et blanc diffusée sur CBS, cette nouvelle mouture Perry Mason est plus sombre, plus granuleuse et explore les premiers pas d’un futur avocat et enquêteur courbé par la douleur. Matthew Rhys y est excellent, presque divin.

Dès les premiers épisodes, le millésime 2020 de Perry Mason capte par sa fluidité, par son esthétique sublime. En découvrant le bonhomme dans le costume d’un photographe engagé par un chef de studio pour obtenir des photos douteuses, la première esquisse n’est de loin pas reluisante. Nous faisons la connaissance d’un homme crasseux, porté sur la bouteille, la mine effroyable. C’est son mentor, EB Jonathan (John Lithgow), qui va lui offrir l’opportunité de prendre part à un dossier très brûlant dans le Los Angeles des années 30, une ville prête à s’embraser.

Le spectre de la Première Guerre

Le cas le plus tragique de la cité des anges : le meurtre d’un enfant. Le bambin est retrouvé les yeux cousus. Une image atroce qui aura pour effet de canaliser le talent de Mason et le remettre dans le droit chemin. Le personnage imaginé et dépoussiéré par Ron Fitzgerald et Rolin Jones, emprunte des horizons différents de celui de Raymond Burr, de la série d’antan ; nous découvrons ce qui a forgé le héros créé par Erle Stanley Gardner, de sa descente aux enfers à sa vocation. De ses bitures à son activité d’avocat apprise sur le tas, Mason se révèle à travers des failles béantes, comme le spectre envahissant de la Première Guerre. Un personnage campé de manière magistrale par Matthew Rhys, tout en intériorité avant d’évoluer vers un personnage confiant et pugnace.

Là est la grande force de la série : la distribution. Rhys en première ligne, citons Tatiana Maslany (Orphan Black), en prédicatrice, dans la peau de Sister Alice, liée à l’affaire des suites d’un complot religieux – directement ou indirectement, vous le saurez bien. Bonne prestation également pour Chris Calk, sous les traits d’un flic combattant ses supérieurs corrompus. Gayle Rankin, en mère endeuillée, ou le toujours excellent Shea Whigham dans la peau du partenaire de Mason, réussissent à densifier le récit.

Comme un goût d’Atlantic City

Indirectement, Perry Mason rappelle Boardwalk Empire, dans sa tonalité et sa réalisation. Facile quand on sait que Timothy Van Patten est à la mise en scène, déjà aux commandes de plusieurs créations HBO – citons encore les Sopranos. Loin d’Atlantic City, place à un Los Angeles noir. Dans Perry Mason, les années 30 sont sombres, elles transpirent le racisme et l’inquiétude. La ville en est tapissée.

Même si l’affaire de meurtre constitue l’intrigue principale, c’est avant tout le voyage entre les différents protagonistes qui plaît, articulé autour du portrait de Perry Mason, la cigarette au bec pour tuer le temps. Perry Mason est une véritable réussite, misant sur la répugnance humaine, sur les caractères énigmatiques d’une large palette de personnages. En ressort une certaine fugacité, dont le mérite revient à Rhys, qui compose à lui seul le mystère de la série.

Dès le 22 juin sur OCS en US+24.


Casting : Matthew Rhys, John Lithgow, Tatiana Maslany, Shea Whigham, Gayle Rakin, Chris Calk

Fiche technique : Créée par : Ron Fitzgerald, Rolin Jones / Date de sortie : 21 juin sur HBO, 22 juin sur OCS / Format : 8 épisodes – 1h / Chaîne : HBO