Les séries et les années ont-elles bonifié Jude Law?

Son nom a souvent été associé à une image de sex-symbol au détriment d’un talent notable et notoire. Ce foutu talent a souvent été utilisé à mauvais escient, avant que le monde de la série ne lui offre quelque chose à la hauteur de son potentiel.

Les aficionados du comédien britannique citeront des films tels que Bienvenue à Gattaca ou le Talentueux Mr Ripley. On serait tenté de citer eXistenZ de Cronenberg, de souligner son début de second millénaire où les projets ont plu et construit la carrière du Londonien. Stalingrad (2001) pour glorieux fait d’arme et Les Sentiers de la Perdition en 2002, avant d’entamer une carrière sous le signe de la romance. Dans cette position de charmeur invétéré, Jude Law empoche les millions et les fans hystériques avec. Son image de « sexiest man alive » lui collera à la peau, lui péjorant son potentiel d’acteur. Sa beauté avant son jeu. The Holiday est là pour confirmer l’équation.

2016, la quarantaine bien tassée et un rôle référence

Des ordres de Guy Ritchie à Steven Soderbergh, Sherlock Holmes à Contagion en passant par Effets Secondaires, l’homme vieillit, prend de la bouteille, délaisse ce costume de dragueur. Le poids des années baissant son sex appeal, Law se tourne vers d’autres horizons. Et c’est tant mieux. 2016, même si on peut évoquer sa prestation dans Dom Heminghway en 2013 et son rôle dans Genius en tant que Thomas Wolfe, c’est bien la petite lucarne qui va lui offrir un rôle référence. Une partition musclée, un personnage de Lenny Belardo dans The Young Pope dessiné par le maestro Paolo Sorrentino.

Pape insaisissable, cultivant une facette mystérieuse et controversée, Jude Law brille, s’amuse à camper un étrange personnage refusant l’autorité, mais est lui-même autoritaire. À mille lieues d’un pape ordinaire, profanant la foi, la démesure comme leitmotiv. Lenny Belardo n’est pas comme les autres, il détonne. Ça tombe bien, comme Jude Law et cette phrase toute cuite pour lui : « Je sais que je suis incroyablement beau. S’il vous plaît, essayons d’oublier cela. » Sorrentino a cerné la carrière de Law en une seule et unique phrase.

Grâce à Canal+, HBO et Sky, Jude Law retrouve de sa superbe. Enfin. Il aura fallu plusieurs années « d’errance » et des productions télévisuelles luxuriantes pour redorer le blason de l’Anglais. Une première saison faite de facéties ubuesques propres à Sorrentino, où Law prêche l’excentricité et se compare à Banksy, Daft Punk ou encore JD Salinger. L’audace de remettre en cause la foi alors qu’on représente le Saint Graal religieux, signe du blasphème ultime – Sorrentino a osé. Dans ce grande culte de l’impertinence, Law signe une performance qui mérite une pluie d’éloges, débordant sur une seconde saison tout aussi solide intitulée The New Pope, qu’il traverse de manière spectrale.

Retour sur HBO en septembre

L’idylle entre Jude Law et la série se poursuit, mais cette fois sous les ordres du créateur d’Utopia : Dennis Kelly. Une nouvelle fois co-produite par HBO et Sky, visible sur OCS, The Third Day, mini-série de 6 épisodes, raconte l’histoire de Sam (Jude Law), accostant sur une île mystérieuse où les habitants cachent de mystérieux secrets. Si Jude Law se détachait de son passé sous les traits du Pape pour créer un nouvel avenir pontifical, c’est bien le passé qui viendra le ramener face à ses douloureuses vérités dans The Third Day. S’enliser dans des rôles sans réelles profondeurs, sans pouvoir user de son potentiel, il aura fallu un maelström pontifical comme clé de voûte, et désormais une île pour nouvel environnement. Plus le temps de se pavaner, de séduire au moindre plan, ce Jude Law à la calvitie naissante démontre une vraie puissance de jeu. Et comme si c’était écrit, Errol Flynn se plaignait d’avoir une beauté qui ruinait ses chances d’être pris pour un acteur sérieux. Jude Law l’avait campé pour Martin Scorsese, dans The Aviator. Coïncidence cocasse. Une théorie qui colle bien à notre sujet.

Jude Law, à mesure que sa carrière progresse et que sa beauté mûrit, ne cesse de magnétiser toujours un peu plus, exploitant, en contradiction avec le temps, un physique toujours avantageux pour les cinéastes. Jude Law, un acteur pas comme les autres.