Avec « Katla », nous tenons une nouvelle série de qualité sur Netflix. La bande à Reed Hastings nous offre une immersion poignante à Vik, en Islande, grâce à la patte du cinéaste et créateur Baltasar Kormákur.
Une disparition mystérieuse et les paysages ahurissants de beauté, ces premières lignes devraient de suite vous embarquer. « Katla » est une série qui promet sur le papier, qui fait la part belle au troublant registre noir nordique. À Vik, un an auparavant, une éruption d’un volcan sous-glaciaire avait ébranlé la communauté. Désormais, il ne reste qu’une grappe de personnes dans une région chaotique. Un jour, une étrange apparition vient semer la zizanie, venue des entrailles glaciaires et volcaniques.
L’Islande est l’endroit parfait pour s’immerger dans la Nature la plus humide qui soit, la plus rugueuse mais si poétique. Les mystères du monde semblent se cacher sous les pieds des Islandais, sous cette terre en mouvement et ces glaces renfermant des secrets préhistoriques. Le mystère est déjà là, sous le village de Vik. Les habitants ont déserté et les environs sont apocalyptiques, recouverts de cendres noires comme ces quelques âmes qui habitent dans le coin. La glace délavée, les visages livides et marqués par le froid, « Katla » sombre dans la tristesse et la mélancolie. Ses personnages qui la peuplent sont des individus rompus au deuil.
Un panel d’âmes blessées
Très rapidement la série dépoussière les blessures passées : Grìma (Guorun Yr Eyfjöro) peine à digérer la disparition de sa soeur, Àsa (Iris Tanja Flygenring), Darri (Björn Thors) est endeuillé par la mort de son rejeton, Thor (Ingvar Sigurdsson), le père de Grìma, dissimule un secret, et Gunhild (Aliette Opheim) revient sur les traces de son passé tortueux. Tous sont reliés par les regrets et un deuil non-consommé. Vik prend des airs de cimetière des âmes, d’un paradis antérieur recouvert désormais par les cendres et la désolation. La joie n’est plus, l’amour est partie en fumée. Kormákur sculpte dans les glaces éternelles, des plaies personnelles. Le magma en fusion réveille le chaos et le modèle pour rendre une forme physique aux différents deuils.
Si le mystère demeure, si nous nous demandons par quel phénomène naturel ces « revenants » détalent couverts de cendres et d’argile, il devient clair que tout ça n’est que très secondaire. Enveloppée par la musique subtile de Högni Egilsson, la nature dans toute sa grandeur ramène ces individus à une profonde réflexion. « Katla » n’est pas spectaculaire, mais elle radiographie de manière originale la délicatesse du deuil et l’affranchissement du passé. Ces « changelins » comme sont nommés les « revenants », sont une seconde chance, une manière de mettre des mots sur la douleur. La souffrance terrée dans les lugubres travées glacières prend des airs de paradis des maux et l’écume froide ravale haine et amertume. Baltasar Kormákur et son acolyte Sigurjón Kjartansson ont réussi une série terriblement sensible et tendre à propos du deuil, tout en retenue et en originalité, pour enfin faire sauter les verrous de la vérité pour un dernier adieu.
Casting : Guorun Yr Eyfjöro, Iris Tanja Flygenring, Björn Thors, Aliette Opheim
Fiche technique : Créée par : Baltasar Kormakúr et Sigurjón Kjartansson / Plateforme : Netflix / Format : 8 épisodes – 45 min / Date de sortie : 17 juin 2021