L’homme des milieux carcéraux, le soldat des peines et des exploits sportifs, le preneur d’otage qui souhaite faire justice. Différents visages pour un acteur aux rôles toujours douloureux, poignants. Jack O’Connell connaît la chanson : souffrance et hargne comme gagne-pain.
Une naissance à Derby, un jour de fête nationale helvétique, en 1990. Des origines paternelles irlandaises, un tempérament vif et un jeu à l’image de l’homme : physique et puissant. Le public l’a connu dans la série phénomène Skins, entre 2009 et 2013, avant de confirmer au cinéma, dans l’excellent Les Poings contre le mur, et dans le très tendu ’71 de Yann Demange. Deux prestations de haut-vol qui le propulsent sur le devant de la scène, dans le rôle de Louis Zamperini. Sous les ordres d’Angelina Jolie, O’Connell trouve dans Invincible une performance complexe, physique, la silhouette fondant à vue d’oeil.
L’éclosion est en cours
De 2014 à 2016, les projets de films ont afflué. Une année faste lui permettant de prendre place dans divers films qui ont rapporté pas mal d’argent au box-office. 2017 fut moins bonne, avec des oeuvres attrayantes sur le papier, mais décevantes dans leur finalité. HhHH de Cédric Jimenez ou encore Tulip Fever n’ont rien donnés de très folichon. C’est plutôt vers ses premières amours, le format sériel, que O’Connell retrouve des couleurs dans Godless, une série Netflix d’un bon calibre, lui permettant de reprendre un peu de hauteur. Lui, dans la peau de Roy Goode, le chassé, la cible d’un hors-la-loi.
Jack O’Connell parvient à traduire cette vulnérabilité, tout en laissant transparaître cette furieuse rébellion, cette colère indicible. Toujours sur le fil, souvent embauché pour interpréter des rôles scabreux, à lutter contre les éléments ou la violence de notre monde, l’acteur anglais en a fait sa spécialité. Impeccable dans Les Poings contre le mur, il l’est tout autant dans Invincible. Des rôles nerveux dans lesquels l’acteur n’hésite pas à mettre à profit sa gueule, sa posture, sa démarche douloureuse.
Les eaux troubles comme leitmotiv
C’est encore dans les eaux troubles qu’il continue à voguer, se glissant dans la peau d’un homme, Cameron Todd Willingham, accusé du meurtre de ses 3 enfants et exécuté par injection létale en 2004. Ou encore sous les ordres d’Andrew Haigh dans la série événement de la BBC : The North Water. Sous les traits d’un ancien chirurgien, il prend la mer aux côtés d’un psychopathe meurtrier – interprété par Colin Farrell -, dans un périple funeste, pour fuir les horreurs de son passé. Une quête froide, violente, adaptée du roman de Ian McGuire.
Acteur instinctif, toujours dans la nuance, Jack O’Connell prend en épaisseur. Le natif de Derby repousse souvent ses limites, se démarque par une justesse que peu d’acteurs parviennent à incarner, à même effleurer. Son intensité de jeu le place dans la cour des grands. Un peu hors des radars ces 2 dernières années, la suite s’annonce radieuse.