Euphoria : le premier teen drama de HBO, obscur et violent

Après les succès de 13 Reasons Why ou encore Elite, les séries dramatiques pour ados ont le vent en poupe. Pas vraiment étonnant de voir HBO riposter avec un teen drama, une première pour la chaîne câblée qui n’avait jamais investi ce territoire auparavant. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle n’a pas fait les choses à moitié.

Pour l’occasion, HBO s’est associé à A24, studio indépendant à l’origine de The Spectacular Now avec Miles Teller, A Most Violent Year, et plus récemment, Under The Silver Lake, High Life, Hereditary, Lady Bird et l’inoubliable Moonlight primé aux Oscars en 2017. La liste est encore longue mais, vous l’aurez compris, A24 est un vivier à projets aussi ambitieux que passionnants, désireux de s’implanter dans le milieu sériel suite à une collaboration avec Hulu pour la série Ramy. Et rien que pour ça, on avait vraiment hâte de découvrir Euphoria. Adaptée d’une série israélienne du même nom diffusée en 2012, elle-même tirée d’une histoire vraie, Euphoria à la sauce US a été créée par Sam Levinson (Assassination Nation) et compte dans ses rangs Drake et Future The Prince comme producteurs exécutifs, accompagnés de Ron Leshem et Daphna Levin, les créateurs de la série israélienne.

Sur le papier, la série traite de la vie de quelques adolescents dans leur quête identitaire et premiers émois amoureux et sexuels. Jusque-là, rien de très original. Oui, mais force est de constater qu’après avoir visionné les 4 premiers épisodes, la cible ne se situe pas vraiment dans la tranche des 12-18 ans. Alors Euphoria, ça traite de quoi exactement ? Et surtout, à qui s’adresse cette série dramatique ?

Photo copyright : HBO

« Je suis née 3 jours après le 11 septembre ». C’est sur ces paroles que le contexte est planté. Rue (Zendaya) est une ado pareille à des millions d’autres, élevée au sein de la classe moyenne dans une banlieue américaine typique. Et pourtant, depuis son plus jeune âge elle semble souffrir, selon une thérapeute, de plusieurs maux tels que des troubles obsessionnels compulsifs, bipolarité, déficit de l’attention et anxiété. « Le monde va vite alors que mon cerveau lui va lentement ». Un rail de coke plus tard et un sentiment indescriptible, addictif, les premières notes de « Can’t Get Used to Loving You » de Andy Williams retentissent, sample du très célèbre titre « Hold Up » de Beyoncé prenant ensuite le relais. Rue est une droguée, un rien menteuse et ne compte pas arrêter avec ses addictions. Tout juste sortie de cure de désintox, alors que l’année scolaire débute à peine, elle file se ravitailler chez son dealer. Autour d’elle gravitent des ados, eux aussi perturbés d’une façon ou d’une autre. À commencer par Nate (Jacob Elordi) le beau gosse rustre et violent, ou Jules (Hunter Schafer), la petite nouvelle qui, à sa naissance, était un il. Tous essaient de vivre ou survivre dans des contextes familiaux loin d’être idéaux. Entre quête identitaire, premières amours et prémisses d’une vie sexuelle défigurée par l’omniprésence d’images pornographiques, la drogue, l’alcool et la violence viennent se mêler au jeu et le cocktail est explosif.

Une jeunesse au bord de l’implosion

On est loin de la série pour ados lambda. Trash, crue, brutale par moments et où le sexe et la violence sont omniprésents, Euphoria dépeint une jeunesse déphasée et débridée, une vision pessimiste mais pas moins réaliste d’une adolescence qui doit livrer bien des luttes avant même d’avoir mis un pied sur le champ de bataille. Alors qu’à 16 ans, l’insouciance et la liberté devraient avoir le dernier mot, c’est tout le contraire dans Euphoria. Les rapports de force sont légion, autant en amour qu’en amitié ou en famille. Alors pourquoi tout est à ce point faussé ? Qui grandit sur des bases bancales ne peut se construire solidement, non ? Chaque adolescent de la série doit faire face à des problématiques personnelles plus ou moins difficiles mettant en péril son bon équilibre. Grandir n’est déjà pas simple, mais grandir dans un milieu où tout est passé sous silence, tabou ou interdit reste un challenge bien trop lourd à relever.

Pour interpréter ces ados en perdition pour qui tout semble fini avant que ça n’ait commencé, on retrouve des acteurs interprétant des rôles à contre-emploi. À commencer par Zendaya qu’on connaît mieux pour avoir débuté sa carrière sur Disney Chanel. La jeune actrice livre une prestation convaincante dans la peau de Rue, cette jeune fille qui se drogue pour s’anesthésier l’esprit. Ou encore Jacob Elordi, devenu l’idole de millions de groupies suite à son rôle de bellâtre bagarreur à la mèche bien peignée dans le dispensable The Kissing Booth sur Netflix. Tout en délicatesse avec la gent féminine, il se montre violent mais souffre surtout de sa relation complexe avec son père.

À contre-courant des séries d’ados bien rangées, Euphoria peint une fresque sombre d’une jeunesse tourmentée et complexe qui a perdu de vue l’essentiel, sûrement parce qu’on ne lui a jamais montré la voie. Au bord de l’implosion, les émotions sont exacerbées. La bande d’ados subit une vie qu’elle arrive à peine à comprendre. Après tout, que sait-on vraiment à 16 ans ? Subtile et trash à la fois, Euphoria saute à pieds joints dans une multitude de thématiques allant de la transsexualité à la pornographie comme norme, en passant par l’addiction. Autant de thèmes primordiaux abordés frontalement qui doivent être, plus que jamais, traités sans détour. Une série digne d’intérêt.

Euphoria sera diffusée en US+24 sur OCS, dès le 17 juin.

Casting : Zendaya, Jacob Elordi, Alexa Demie, Austin Abrams, Algee Smith, Sydney Sweeney, Storm Reid, Nika King, Eric Dane, Maude Apatow, Barbie Ferreira, Hunter Schafer

Fiche technique : Créé par : Sam Levinson / Écrit par : Sam Levinson/ Réalisé par : Sam Levinson (3 épisodes) / Genre : Drame / Chaîne : HBO / Diffusion : 16 juin 2019 et 17 juin sur OCS / Format : 10 épisodes – 60 min / Pays : USA

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