Au moment précis où Rami Malek arrive à l’écran, je me pose toujours cette question : est-il un acteur de seconde zone bien aidé par un agent au bras long ou est-il tout simplement un excellent acteur ?
Pour citer un exemple récent, quand Robert Pattinson donne la réplique à John-David Washington dans Tenet, je me dis instantanément que ces deux sont faits d’un métal pour conquérir les plateaux ; ou que Shia LaBeouf – malgré ses déboires – est d’une telle intensité qu’on lui pardonne ses tics de jeu, si on se réfère à des acteurs de la même génération. Ils ont ce petit plus pour accaparer l’attention. Mais pour Rami Malek, je dois bien avouer que son jeu reste une énigme parfois difficile à déchiffrer.
Après une dose inhumaine de caféine, je décide de me lancer dans une quête qui a pour but de répondre à cette simple question : Rami Malek, talent ou supercherie ?
Direction Amazon Prime et une session intense de Mr. Robot, son chef-d’œuvre à mes yeux. Inutile d’en dire plus : très solide, bien aidé par une écriture et par un sens du cadre qui frôle la perfection. Sam Esmail lui a offert son ticket pour la gloire grâce à un rôle de cette trempe. Et si la partition lui va comme un gant, un premier élément de réponse se dessine : sa capacité à intérioriser pour nous engloutir avec ses grands yeux.
Un jeu en intériorité pour ne laisser que des fragments transparaître
Mais même si sa performance est à citer en exemple, faisant même date dans le paysage sériel, il m’en manque ; je n’arrive pas à me décider s’il est un acteur solide ou pas. Papillon (le remake) me pousse à penser qu’il ne fait qu’une transposition de sa performance de Mr. Robot dans un film dispensable, tout en me laissant une bonne impression. Mais une fois encore, je n’arrive pas à faire de l’ordre dans mon esprit pour me convaincre que Malek a la carrure d’un grand et qu’il fait partie de la race des seigneurs, si cher à Alain Delon. S’envient donc Bohemian Rhapsody, je (re)visionne de nombreuses scènes, mais je n’y vois qu’une performance correcte, voire surévaluée – Malek a raflé son premier Oscar sous les traits de Freddie Mercury -, mais pas de quoi se laisser aller aux éloges. Je reste sur ma faim.
Soit, il me faut encore creuser, quitte à m’amputer quelques heures de sommeil. Je me remémore les premières fois où je l’ai aperçu à la télé, dans la peau de Kenny dans La Guerre à la maison. Allez, il était drôle dans le rôle du meilleur pote gay, mais rien de très emballant. Je me remets à chercher, à comprendre, à suivre étape par étape sa carrière.
Un podcast comme illumination
Ma réponse ne sera pas les quelques bribes de The Little Things, le nouveau film de John Lee Hancock ou encore son arrivée dans la peau du grand méchant Safin, dans le prochain James Bond. Non, la réponse à l’équation Rami Malek me viendra de manière inattendue : un podcast intitulé « Blackout ». Dès le premier épisode c’est une illumination venue prouver l’une de ses singularités : sa voix. Son simple timbre vous harnache à l’histoire, il vous scotche à votre dossier de chaise. À l’instar de comédiens tels que Joel Kinnaman ou Matthew McConaughey, ils ont cette capacité vocale permettant de construire un personnage, lui attribuer une puissance dramatique. Malek est dans la même catégorie, peut-être un cran au-dessus – question de perception ou de rôle.
Sa voix dans « Blackout », excellent podcast réalisé par le sous-estimé Shawn Christensen (Before I Disappear, Sidney Hall), couplé à son jeu tout en retenue répond à ma question : oui, Rami Malek est un excellent acteur capable de vous embarquer par sa simple voix dans un podcast où tout un pays et la civilisation moderne sombrent dans une panne d’électricité. Ces deux facteurs font de lui actuellement une valeur sûre. Pour combien de temps ? L’avenir nous le dira.