Baromètre sériel #22 : 3 séries à voir ou à éviter

Dans ce nouveau baromètre, il est évidemment question d’un retour inespéré, celui de Dexter Morgan. Toujours incarné par son impeccable interprète Michael C. Hall, « Dexter : New Blood » fait figure d’épouvantail. Mais il y a une humoriste qui nous amuse et dézingue une époque teintée de nombrilisme, gangrénée par la bien-pensance. Blanche Gardin, dans un faux-documentaire, tire sur tout ce qui bouge. La 3ème série traite d’un girls band prêt à remettre le couvert pour retrouver les strass et les paillettes. De l’humour noir au menu.

Dexter : New Blood (Showtime et diffusée sur Canal+)

Une annonce, à la surprise générale. Personne n’y croyait mais Dexter Morgan est bien de retour. Tout nouveau, tout repenti, tout gentil ; il n’a plus tué depuis plusieurs années, le bougre. Renommé Jim Lindsay, il est dorénavant vendeur d’armes dans une petite ville, loin des chaleurs floridiennes. À présent, place au froid et à la neige. Toujours est-il que les froides intentions du tueur en série ne sont jamais loin, même si 10 ans se sont écoulés. Elles sont dans un coin de sa tête. Chassez le naturel et il revient au galop.

L’éternel Dexter Morgan, j’ai nommé Michael C. Hall, avait pris congé de ses fans dans un final raté, en 2013. 2021 est l’année pour réparer les dommages et conjurer le sort des fins sérielles bâclées. Il n’est donc pas fait mention d’une saison 9, mais bien d’une mini-série (« New Blood ») pour une fin alternative. Présentée comme « une géniale opportunité d’écrire une deuxième fin » par son producteur exécutif Clyde Philipps, « Dexter : New Blood » est assurément un bon retour, voire un très bon. Le nouveau rôle du gentil monsieur Lindsay va rapidement voler en éclat pour laisser revenir le Dexter Morgan sibyllin et meurtrier. Et départ, l’atmosphère hivernale fait place à la glaçante lame aiguisée, découpant les bouts de peau des victimes du tueur psychopathe. 

Dans des tons plus sombres, toujours à jongler entre humour noir et séquence à la violence radicale, « Dexter : New Blood » ravive l’esprit de Debra, la défunte soeur de Dexter. Et le plaisir est toujours intact quand la parfaite Jennifer Carpenter débarque à l’écran, en fantôme un peu envahissant. Elle est érigée en une conscience qui lui impose une discipline de fer. Mais à trop se retenir, un jour l’explosion fait de sérieux dégâts. La série poursuit dans la même lignée, certes, mais se densifie dans la trame psychologique de son anti-héros. En témoigne l’arrivée de son fils, Harrison (Jack Alcott). Du sang neuf donc, mais de l’hémoglobine qui reste la même : celui d’un monstre, mais en pleine évolution. 

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La Meilleure Version de moi-même (Canal+)

Elle fait la promo sans donner d’interview. C’est la recette Blanche Gardin depuis plus de 4 ans. Un ras-le-bol des médias, des réseaux sociaux ? Sûrement. Elle exprimait « son dégoût du monde numérique et de cette forme d’esclavage ». Soyez-en certains, elle déglingue cette époque dite numérique. Elle s’amuse même à mitrailler la bien-pensance dégoulinante de notre ère devenue hystérique et incontrôlable. 

Dans « La Meilleure Version de moi-même » elle s’occupe avec férocité de notre race nombriliste et autocentrée. Elle va droit dans le tas et n’hésite pas à passer en revue la bêtise sociale, ou l’hygiénisme, c’est selon. Un grand coup de pied dans la fourmilière en forme d’auto fiction co-signée avec deux autres personnes : Noé Debré et Béatrice Fournera. Un humour grinçant armé par la tata flingueuse de la comédie. Les coups pleuvent. 

De la provoc’ à 200%, avec en prime un invité qui ne fera pas l’unanimité : Louis C.K. Elle ose tout Blanche Gardin, dans un registre fictif. Son personnage à l’humour noir et parfois crispant, fait un bien fou à cette époque étrange. Et rien que pour son audace, la série mérite d’être vue et peut-être même revue. 

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Girls5eva (Peacock et diffusée sur Canal+)

Un girls band has been qui décide de retrouver la lumière des projecteurs, voici « Girls5eva ». C’est les derniers balbutiements de la pop des années 90, c’est le kitsch à son paroxysme. Désormais aux oubliettes, les 5 chanteuses ont changé d’horizon. C’est un jeune rappeur, Lil Stinker, qui va sampler leur tube. Résultat : elles retrouvent une gloire éphémère sur le plateau de Jimmy Fallon. Et l’idée fait son chemin : pourquoi ne pas se lancer dans une réunion et abandonner leur vie insatisfaisante ? 

Elles sont désormais 4, après la mort d’Ashley (Ashley Park). Elles se nomment Dawn (Sara Bareilles), Summer (Busy Philipps), Gloria (Paula Pell) et Wickie (Renée Elise Goldsberry). Un hypothétique retour qui provoquera une remise en question de leur carrière d’alors ; les choix et les chansons qu’elles interprétaient, des textes qui soulevaient une misogynie consternante. Des années plus tard, dans un élan comique bien dosé, place à l’autocritique pour les 4 femmes. 

Produite par Tina Fey et créée par Meredith Scardino, scénariste de « Unbreakable Kimmy Schmidt », « Girls5eva » est absurde, incarnée avec frénésie par son excellent casting. Les personnages secondaires sont souvent loufoques, comme Tina Fey herself dans le rôle d’une Dolly Parton fantasmée, ou le fan fou furieux Zander (Bowen Yang). Une série énergisante, parfois trop généreuse et poussive, mais toujours dans un humour dense et efficace. Un bon programme qui vous fera rire de bon coeur.