Deux plateformes de streaming, deux films, un point commun : Adam Driver. On n’en finit plus d’entendre parler de lui et pour cause ! L’ex-marine américain, reconverti en acteur et révélé dans la série Girls, enchaîne les rôles et livre des performances bluffantes. Si on l’a vu dernièrement dans Star Wars : L’Ascension de Skywalker, c’est dans ces deux autres films que l’Américain excelle aux côtés d’autres comédiens talentueux. Vous avez raté ces films en 2019 ? On vous conseille de les mettre sur votre liste de films à voir 2020.
The Report (Amazon Prime)
Présenté au Festival de Sundance en janvier 2019, puis diffusé sur Amazon Prime à partir du 15 novembre de la même année, The Report, écrit et réalisé par Scott Z. Burns, raconte la vraie histoire de Daniel J. Jones, ancien enquêteur du Sénat américain. Daniel Jones (Adam Driver) est chargé par la sénatrice Dianne Feinstein (Annette Bening) de mener une enquête sur les programmes de détention et d’interrogatoire menés par la CIA suite aux attentats du 11 septembre. Au fil de ses recherches, il découvre des vérités choquantes qui seront répertoriées dans un document de plus de 7000 pages consacré à cette affaire et commandé par le US Senate Select Committee on Intelligence.
Une immersion passionnante dans les affaires d’État, dans les couloirs les plus sécurisés des services de renseignement d’une des plus grosses puissances mondiales ou comment, en toute impunité, des hommes, au nom d’une soit-disant justice et pour le bien de leur nation, se sont permis les pires sévices pour arriver à leurs fins. Alors qu’en toute logique la CIA a fait du terrorisme sa priorité numéro une après les évènements du 11 septembre, The Report aborde le thème sensible de la torture en racontant les dérives commises par les services de renseignements jugés au-dessus de tout soupçon.
Travail scénaristique exigeant et audacieux, métrage extrêmement bien documenté, The Report fonctionne au rythme d’une timeline sur laquelle on navigue. Une timeline faisant des allers-retours dans le temps pour nous permettre de reconstituer les évènements. Terrée dans leur pièce ultra sécurisée, sans fenêtre, avec à peine une photocopieuse à disposition, l’équipe de Daniel Jones abat un travail colossal afin de reconstituer les faits. Dans les méandres d’une administration peu encline à coopérer, avec une menace constante pesant sur ses épaules, Jones, interprété par un Adam Driver impeccable, est pris en étau entre devoir, intégrité et valeurs morales, posant une question centrale : la fin justifie-t-elle les moyens ?
Avec une nomination aux derniers Golden Globes pour Annette Bening pour meilleure actrice dans un second rôle, The Report déploie un joli casting. Avec notamment Jon Hamm (Mad Men), Corey Stoll (The Deuce, Girls), Maura Tierney (The Affair) ou encore Michael C. Hall (Dexter), c’est Adam Driver qui mène le bal en enquêteur discret, assidu, dont la vie se retrouve complètement bouleversée par la tâche qui lui a été assignée. Comment ne pas pas prendre à coeur une mission aussi délicate ? Une performance à la hauteur du scénario concocté par Scott Z. Burns, irréprochable, pour un film captivant dénonçant un système déviant qui, au nom du trauma subi, a oublié les fondements même d’une démocratie en reproduisant les atrocités contre lesquelles il est censé se battre.
Marriage Story (Netflix)
Sans transition, on saute d’un registre à l’autre. Marriage Story c’est le 12ème film de Noah Baumbach, présenté à la Mostra de Venise en 2019 et sorti le 6 décembre dernier sur Netflix. Pas moins de 6 nominations aux prochains Oscars qui se dérouleront en février prochain, dont le meilleur acteur, la meilleure actrice et le meilleur film. Autant dire une jolie épopée pour le réalisateur de 50 ans qui signe ici l’un de ses meilleurs films.
Charlie et Nicole forment en apparence un couple heureux. Lui metteur en scène à New York, elle ancienne actrice tout droit venue de Los Angeles, travaillant désormais avec la troupe de son mari. Ils sont parents d’un petit garçon, Henry. Alors que tout semble aller comme sur des roulettes, mari et femme décident de se séparer. Le divorce, qui se voulait d’abord à l’amiable, prend des proportions inattendues lorsque Nicole décide de rester vivre à Los Angeles pour son travail. Cette dernière se résout à engager une avocate impitoyable pour faire valoir ses droits. Charlie, de son côté, tombe de haut lorsqu’il apprend que sa future ex-femme projette de rester vivre sur la côte ouest. Tout dégringole et ce qu’il restait de civilité entre les anciens partenaires se transforme rapidement en rancoeur.
Marriage story c’est une histoire banale en somme. L’histoire de beaucoup de couples, ce qu’ils traversent, les étapes pratiques et émotionnelles à franchir lors d’une séparation, le parcours du combattant aussi lorsqu’un enfant se retrouve au milieu du conflit. Noah Baumbach brosse le portrait d’un couple qui se désintègre après s’être aimé ou comment peut-on passer d’êtres intimement liés à étrangers bourrés de ressentiments. Triste, sournois, drôle aussi, l’écriture du réalisateur fait s’entrechoquer des personnages touchants, parfois loufoques, sans jamais caricaturer.
En première ligne, le duo Adam Driver et Scarlett Johansson, couple rongé par les non-dits, doit trouver une nouvelle façon de vivre ensemble, pour le bien de leur fils. Alchimie réussie entre les deux acteurs qui livrent des performances exemplaires. Qui pourrait dire le contraire en visionnant la scène surréaliste de la dispute où chaque mot, mouvement et clignement de cils ont été chorégraphiés par Baumbach. En résulte une scène hystérique durant laquelle les deux acteurs lâchent complètement prise, jouissif ! Entre larmes et rires, notre coeur balance.
Si les deux acteurs principaux sont brillants dans leur rôle respectif, le réalisateur a pris un soin tout particulier à développer des personnages secondaires d’une grande qualité. On retrouve ainsi une Laura Dern en avocate impitoyable en talons aiguille, californienne de base au décolleté vertigineux, drôle et un peu tête à claque aussi, un Ray Liotta, avocat lui aussi, pendant masculin de sa consoeur ou encore un Alan Alda, avocat encore mais un zeste d’humanité et de bon sens en plus. Des personnages secondaires qui finissent de dépeindre une fresque romantico-dramatique honnête écrit par un vrai storyteller en la personne de Noah Baumbach