Requin Chagrin : « La scène francophone manque un peu de fuzz ! »

Requin Chagrin est le groupe français qui monte. Une surf wave savoureuse qui glisse dans vos oreilles. Le quatuor emmené par Marion Brunetto a même tapé dans l’oeil d’un certain Nicola Sirkis. Un coup de foudre qui débouche sur une signature sur le tout nouveau label du leader d’Indochine : KMS. En découle un tout nouvel album, tout beau, tout neuf, nommé Sémaphore. Sorti le 25 janvier, cet opus marque une évolution pour la formation française : plus fourni, plus percutant. 2019 est une avancée notable dans la carrière de Requin Chagrin. Marion Brunetto dessine une pop entraînante qui vous prend directement grâce à sa profondeur. « Croisades » et « Clairvoyance » écument les fonds océaniques, une poésie énigmatique qui vous porte vers le sommet des vagues. « On s’évapore autre part » entonne Brunetto. Tout est dit. La formation basée à Paris est attendue au Romandie de Lausanne le 18 avril. Pour faire un peu plus connaissance, Marion Brunetto s’est prêtée au jeu de l’interview. Entretien.

Requin Chagrin, un squale chagriné qui souhaite faire un clin d’oeil à Michel Sardou ? Pourquoi ce nom ? Pouvez-vous vous présenter ?

Marion Brunetto : Salut! Moi c’est Marion, je chante et je fais de la guitare dans Requin Chagrin. Gaël est à la guitare et aux claviers, Greg à la basse et David à la batterie. Le nom « Requin Chagrin » vient d’une recherche désespérée dans les abysses du web et il s’agit en fait d’une vraie espèce de requin. J’ai trouvé que le nom collait plutôt bien avec les premières démos. Mais c’était avant de m’apercevoir que c’était aussi un titre de Michel Sardou et d’un bar populaire à Paris.

On sent les fortes influences eighties. Un côté très surf wave, une pop rêveuse (dream pop) presque vaporeuse. Mais si on se laisse bercer par le travail mélodique entraînant, on sent l’évocation de problématiques, d’émotions moroses. Quand on regarde la « track list », on songe à un roller coaster de la vie. Votre second album, est-il un hymne à la vie avec ses hauts et ses bas ?

C’est plutôt exact. J’avais envie de terminer cet album avec « Le grand voyage » qui pour moi évoque la fin d’une aventure, d’une histoire… Ensuite, au moment d’écrire les textes de « Croisades », qui ouvre l’album, je voulais raconter entre les lignes mon départ de mon village pour Paris. Du coup, il y a en quelque sorte un début, des petites histoires au milieu, et une fin.

Sentiez-vous plus d’appréhension, plus de pression durant la confection de ce second album en comparaison du premier ?

C’est vrai que mon état d’esprit était un peu différent entre le premier et le deuxième album. Le premier s’est fait entre 4 murs, un peu à la va-vite. C’était un gros bricolage ! Et pour le second, je voulais prendre mon temps, je voulais optimiser ma manière d’enregistrer, avant de travailler avec Adrien Pallot (ndlr : le producteur). Je me suis un peu pris la tête disons, avec ce qu’il faut comme pression pour avoir envie de bien faire.

Votre album « Sémaphore », si on devait l’associer à un film, lequel serait-il ?

Le choix est difficile mais… Allez, Paranoid Park.

Qu’est-ce qui différencie vos deux albums ?

Le premier est plus “sunshine”, il sent l’été. Le deuxième se passe plutôt au crépuscule, au coucher du soleil, entre chien et loup, et un peu plus vaporeux.

Nicola Sirkis m’a fait confiance sur ce deuxième album.

Maintenant que vous êtes signés chez KMS, le label de Nicola Sirkis, comment voyez-vous l’artiste hors du costume de leader d’Indochine ? Un genre de papa artistique ? A-t-il changé votre vision musicale et artistique ?

(Rires) J’aime bien “papa artistique”. C’était assez étonnant justement de le rencontrer en dehors des concerts que j’ai pu voir d’Indochine. C’est super de travailler ensemble. Je n’ai pas l’impression que ma vision artistique ait changée. Indochine m’avait déjà touchée quand j’étais ado et puis Nicola m’a fait confiance sur ce deuxième album, j’ai pu enregistrer avec le même enregistreur cassette !

La scène française est de plus en plus fournie et plus populaire. En y regardant de plus près, il y a un vrai retour en arrière, une musique rétro et même une « redécouverte » de la variété française. Les nouveaux groupes francophones n’hésitent plus à user de la langue de Molière pour leurs textes. Comment expliquez-vous ce changement ? Un ras-le-bol de l’anglais ? Un besoin de renouer avec ses racines ? Ou est-ce simplement cyclique ?

Je n’ai pas assez de recul pour analyser tout ça. En tout cas c’est chouette de voir que des groupes ou artistes n’hésitent pas à chanter en français, Il y a un côté peut-être plus direct.

Est-ce que vous trouvez des similitudes entre le dessin et la musique, dans le processus ?

Sans doutes de manière indirecte quand je compose. En tout cas, c’est amusant de pouvoir bidouiller des petites images pour habiller des couvertures Facebook, par exemple. Et puis là je me suis occupée du livret de l’album. C’était un vrai challenge.

Quel regard portez-vous sur cette nouvelle vague musicale française et sur la scène musicale en général ?

Difficile à dire, mais ça bouillonne, ça chante en français pour la plupart et c’est plutôt cool tout ça, même si ça manque parfois un peu de fuzz.

Si vous deviez choisir un artiste qui vous a marqué à vie, lequel serait-ce ?

Leo Fender !

Et quel est le dernier artiste sur qui vous avez cliqué ?

Sur le groupe Suicide, je voulais ajouter le titre “Cheree” à ma playlist.